dimanche 25 juillet 2010

Les vidéos (ah cette chère connexion parisienne!)

Ca fait une semaine que j'essaie de vous mettre en ligne des vidéos et une fois à Paris c'est fait en 5 min...(la qualité youtube est pourrie m'enfin!).
La petite vidéo du chant des enfants....

...etla vidéo de cloture que j'ai faite du projet "Sinema Espwa" (qui sera projeté la ssemaine prochaine, on n'a pas pu le faire avant à cause du temps)

samedi 24 juillet 2010

Départ le coeur gros

Je ne sais pas par où commencer. Tout se bouscule dans ma tête. Pour vous dire vrai, si proche de mon départ, je suis complètement perdue. Je le dis depuis le début, je suis contente de rentrer. Mais des sentiments contradictoires me tiraillent. Je vais avoir énormément de mal à quitter ce pays, à retourner à mes études (après plus d'un an de glandouille) et surtout, je n'arrive plus à me rappeler pourquoi j'ai choisi un master en maths et éco alors que je n'aime pas franchement ni l'un ni l'autre et que je n'ai pas du tout le niveau requis (et j'ai manqué les cours de mise à niveau puisqu'ils étaient en juin).
Mais surtout, j'ai beaucoup changé. Voyez vous, quand je suis arrivée, je me suis tout de suite dit « l'humanitaire sur le terrain, plus jamais ». Et maintenant je réfléchis à mon prochain départ en mission. Il m'a fallu du temps pour me sentir à ma place dans ce monde humanitaire, dans cette ville dévastée, dans cette ambiance pesante. Je cherchais un sens à ma venue ici, je l'ai trouvé, j'ai trouvé bien plus. Il y a quelques jours, un gars me demandait à une soirée « je ne comprends pas l'intérêt pour une ONG d'envoyer une stagiaire de 20 ans dans un pays dans une telle situation ». Ca m'a fait réfléchir et j'ai été assez surprise de voire que j'avais plein d'arguments pour lui répondre (et me défendre :-P). Mais il faut que je reconnaisse qu'envoyer une stagiaire, qui plus est de mon âge, n'est pas courant. Entrepreneurs du Monde est une ONG atypique, un peu à l'arrache niveau sécurité, mais qui croit à ce qu'elle défend, qui est vraie, qui ne ment pas, qui ne fais pas de chichis. Et surtout elle prend des risques. On est une des seules ONG de petite taille à avoir mis un pied à Cité Soleil. On va monter un projet d'entreprenariat à Camp Corail, là où toutes les ONG sont en train de se défiler devant leurs échecs. Je pourrais vous faire une liste looooongue. Ils ont pris aussi un risque et une responsabilité importante en m'envoyant à Port-au-Prince, tout d'abord parce que je manque d'expérience et ensuite parce qu'on voit tout de suite que je suis jeune et je peux etre potentiellement une cible facile pour les attaques en tout genre. Mais ils m'ont acceptée dans leur équipe comme l'une des leurs, une humanitaire en mission. Comme toute stagiaire, j'ai plus appris que ce que j'ai apporté. C'est ça ce que j'expliquais à monsieur « je-ne-comprends-pas-a-quoi-servent-les-stagiaires »: c'est un investissement pour le futur. C'est une formation. Et toute ONG qui se respecte devrait encourager des stages parce que c'est ça qui permet d'avoir une première expérience dans le domaine, mais surtout d'apprendre pour mieux faire quand on aura des responsabilités. Ca éviterait à des bureaucrates de débarquer sur le terrain à 40 ans en n'ayant jamais rien vu d'autres que Paris...Par ailleurs, EDM m'a laissée une marge de manoeuvre très importante. Loin de « servir les cafés », j'ai pu etre responsable d'un projet de cinéma en plein air, monter et écrire une demande de fonds de 140 000 euros, travailler dans les camps à Cité Soleil, faire des rapports au PNUD, assister à diverses réunions...autant de choses qui m'ont permis de m'épanouir dans ce que j'ai fait ici. Pour cela, je veux remercier EDM pour la confiance qu'ils m'ont faite et l'expérience qu'ils m'ont permi de vivre.
Ces 3 mois ont été très denses, aujourd'hui quand j'en fait le bilan, c'est le mot « difficile » qui me vient en premier à l'esprit. Oui, ça a été difficile, surtout le premier mois. Mais je suis contente d'être restée jusqu'au bout, parce que ce n'est que depuis un mois que je me sens vraiment à l'aise, que je commence à parler créole, que je chantonne le kompa, que ...que j'aime ce pays.
Hier c'était une journée émotionnellement très dense et difficile. J'ai arpenté tous les camps à Cité Soleil. Les haïtiens aiment bien les aurevoirs très démonstratifs et mélodramatiques, ce qui rend la tâche encore plus difficile. A chaque fois que je rentre dans une tente d'animation les enfants disent en choeur « bonjour mademoiselle Violaine », ca me fait sourire. Un groupe d'enfant m'a chanté une chanson, j'ai la vidéo mais elle est trop grosse pour ma connexion, qui faisait « qui peut faire de la voile sans vent, qui peut ramer sans rame, et qui peut laisser un ami sans verser de larme. Adieu, adieu ma chère Violaine, adieu adieu ma chère Violaine, mais comme partir ne signifie pas mourir, nous nous reverrons ». Je luttais pour ne pas fondre en larme. Mais à chaque fois que je quittais un camp, c'était le sourire aux lèvres. On a vu des enfants trop fiers nous montrer leurs créations d'artisanat: macramés, crochet, sacs avec des matières recyclés..., des enfants jouer du tambour avec talent, des chorales se mettre en place dans les cours de chant...les animateurs ont des étoiles dans les yeux, et Johnson et moi ça nous donne des ailes. Je dis toujours « on » pour l'animation, nous étions une belle équipe soudée, que je suis triste de laisser. Mi-Aout, Johnson a l'ambition de réunir les 4 camps pour faire une grande manifestation culturelle avec un spectacle des enfants. Si j'avais de l'argent et aucune conscience écologique, je reprendrai l'avion pour voir ça. Un spectacle comme cela à Cité Soleil, si c'est réussi, c'est quelque chose de grand! Tout ca pour vous dire que l'animation fait vraiment de belles choses, que j'aurais voulu que vous voyiez le sourire de ces enfants. L'arrivée à Haïti a été très difficile pour moi, le départ l'est encore plus.
la team animation: de g. a D. : Johnson, Nadine, moi, Julien
Lorena qui est chargée de la communication à EDM va faire un blog je vous mettrai l'adresse. Je mettrai aussi un post quand j'aurai la réponse UNICEF (patience....).

mardi 20 juillet 2010

Questions d'adoption

En ce moment à la maison nous avons deux amies d'un expat qui sont ici pour faire avancer leurs procédures d'adoption, ce qui m'a permis de connaître un peu mieux ce phénomène. Hier à diner on avait invité un monsieur chargé par le gouvernement de régulariser un peu les choses. Remettons les choses dans leur contexte: très peu d'enfants adoptés en Haïti (il me semble que j'ai entendu 10%) sont orphelins. Pour les autres, les parents biologiques ne veulent pas les garder parce qu'ils n'ont pas les moyens de les élever. Le monsieur disait hier à juste titre que si l'ont ouvrait l'adoption à 10 000 enfants on aurait 10 000 enfants, et que c'est un processus très délicat. En effet, la plupart des parents, outre le fait de souhaiter un avenir meilleur pour leur enfant, comptent aussi parfois sur lui pour les aider financièrement plus tard. Comme je vous l'avais dit, c'est très fréquent quand vous êtes blanc qu'on vous propose un enfant dans la rue, de façon très sérieuse. L'adoption ici est estimée pour coûter en tout (avec les trajets, les démarches...) entre 10 000 et 15 000 euros. Il faut payer un avocat, se loger quand on vient sur place etc. Les enfants en attente d'être adoptés sont mis dans des « crèches ». Il y a des crèches tout à fait respectables et d'autres glauques, où les enfants sont maltraités, il y a même eu le cas d'un crèche repère de pédophiles. Il y a un tableau assez noir sur l'adoption en Haïti (avec une absence totale de l'Etat sur le sujet pour le moment, les crèches ont toutes les cartes en main pour faire ce qu'elles veulent). De l'autre côté, il y a ces parents, ces mères, comme les deux qu'on reçoit ici, qui doivent attendre 1 à 2 ans pour pouvoir emmener leur enfant adoptif en France. Quand elle parlent de leur petit, c'est avec des étoiles dans les yeux, et à la question débile que le juge haïtien leur a posée ,« vous pensez pouvoir aimer un enfant noir? », la réponse ne fait aucun doute. Elles se démènent pour leur enfant, enchaînent les voyages couteux, les démarches à n'en plus finir, les changements de législation après le 12 janvier....sans désespérer.
Alors que penser de l'adoption? Je ne sais pas trop comment me positionner, quand on voit la condition de vie de ces gosses c'est sur qu'on se dit qu'une vie en France est une chance inespérée mais ne vaut-il pas mieux combattre la pauvreté efficacement et de pouvoir leur offrir des conditions de vies décentes dans leur pays? Facile à dire....mais à faire....
Sinon pour vous donner des mes petites nouvelles, mon départ approche (dans 4 jours). Quitter ce pays va être bien plus dur que je ne l'imaginais, j'y reviendrai dans un prochain post.
Pour vous continuer ma saga « eau potable à Radio Commerce », après l'anonce de MSF comme quoi l'eau était potable j'ai fait du lobbying pour qu'on l'utilise. Les gens me disent « Dlo la li pa potabl! » et j'avais beau argumenter que si, rien à faire. Finalement quelqu'un me dit « ok, ou ap goute li » (ok, tu vas la gouter alors (mon créole n'est pas bon m'enfin)). Je ne peux franchement pas dire que je veux pas la goûter je ne peux pas être crédible sinon. J'ai donc pris ma bouteille et devant tous les regards des gens du camp je l'ai remplie et bue. Elle a un sale goût salé-chloré. Après c'était psychologique je me disais « tu vas tomber malade, tu vas tomber malade... « . mais finalement non, je suis en pleine forme et je suis allée le leur montrer donc bon, je vais pouvoir reprendre mon lobbying!
Sinon cela fait une semaine qu'on doit clôturer le projet « Sinema Espawa », le cinéma en plein air. Il pleut tout le temps a chaque fois on doit le reporter j'espère vraiment qu'on pourra le faire avant mon départ, on a prévu des chants, des danse, j'ai fait un diaporama/film (que je vous mettrai en ligne si ma connexion s'y résigne) et on voulait projetter Shrek. Demain si Dieu le veut (expression qui ponctue toutes les fins de phrases ici) !


Concernant le projet UNICEF, cela fait un mois que j'attends une réponse, délai qu'on m'avait annoncé. Hier je les appelle et on me dit que la dame qui est chargée de mon dossier est en vacances jusqu'à mi-aout. Elle a refilé la demande de fonds à une autre fille qui a des piles de dossiers sur son bureau et qui m'a bien fait comprendre que ca allait prendre du temps. Et voilà...je dois expliquer à un comité de quartier super impatient et à des enfants motivés qu'on doit attendre que madame rentre de vacances... et je ne pourrai pas voir le début de ce projet qui me tient quand même énormément à coeur puisqu'avec Julien on a beaucoup travaillé dessus et que je l'ai rédigé avec amour :-S
Alalalalalala...les institutions à administrations tantaculaires, comment voulez-vous que 6 mois après on puisse tirer un bilan positif si il leur faut 3 mois pour accepter une demande de fonds???

vendredi 16 juillet 2010

Ti moun yo

C'est pour eux qu'on continue d'y croire, c'est de leur sourire qu'on tire le notre, c'est nos rayons de soleil

lundi 12 juillet 2010

Bilan des 6 mois II: A quoi sert le journalisme?

J'annonce tout de suite la couleur: je suis E-N-E-R-V-E-E.
Je me suis ruée sur internet pour voir les échos de la presse internationale sur le bilan des 6 mois d'action humanitaire à Haïti. Déjà, pour commencer, peu de médias en parlent. Si vous tapez « Haïti 6 mois » dans google vous avez tous les bilans et cris d'alarmes des ONGs: MDM, ACTED, Care, PLAN... normal, il faut bien continuer à récolter des fonds. Mais dans les médias (hors ONG), c'est juste du grand n'importe quoi. On trouve du « Haïti, 6 mois après: frustration » (Alterpresse), « Haïti, 6 mois après: encore dans les gravats » (France 24), « Haïti, 6 mois après, les ONG disent leur inquiétude » (le nouvel obs), « Six mois après le séisme, la reconstruction d'Haïti tarde toujours » (Le Point), « Haïti 6 mois après le séisme »: tout reste à reconstruire » (France Info), « six mois après le séisme, de conditions de vie épouvantables » (Courrier international).
Tous s'accordent sur le fait que la reconstruction est trop lente et une inquiétude se fait sentir dans TOUS les articles: « les 10 milliards promis par la communauté internationale vont-ils arriver? ». MAIS BORDEL C EST PAS CA LE PROBLEME!!! Déjà les 10 milliards en question sur la partie qui est arrivée une très grande proportion va aller normalement aux ONG dans une désorganisation la plus totale. Mais ensuite pour le moment ce n'est pas vraiment une question d'argent. L'argent il y en a. C'est ce qu'on en fait qui est critique. Et AUCUN article (si quelqu'un en trouve je veux bien!) ne se demande pourquoi avec tant d'argent déjà mis sur la table on a si peu fait. Personne ne 'interroge sur le fait que si on a bien ces 10 milliard, que va-t-on en faire? Y a-t-il quelqu'un à la barre du paquebot haïtien qui va finir en Titanic??? Personne n'évalue le travail des ONG, de l'ONU et du gouvernement. Ca sert à quoi le journalisme???????? Ca m'énerveeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeee!  Le Monde est peut-être celui qui a fait le plus d'effort critique: http://www.lemonde.fr/idees/article/2010/07/12/haiti-ou-les-limites-de-la-solidarite-internationale_1386804_3232.html mais bon ça reste flou.  Je suis tellement énervée je tourne en rond, je fulmine, je parle toute seule.
Et à côté de toutes ce conneries la réalité terrain est déprimante. Quelque cas concrets qui se sont déroulés aujourd'hui. Premièrement la question de l'eau potable à Radio Commerce. Vous savez quoi? En fait j'ai rencontré MDM qui m'ont dit que MSF et World Vision avaient fait plusieurs tests et que malgré le fait que l'eau était trop chlorée (aquatabs en force!) elle était potable. On m'a dit que les gens ne voulaient pas la boire car ils pensent qu'elle est la cause de leurs maladies (diarrhées etc.). Selon MDM, c'est surtout attribué à l'insalubrité de leurs récipients pour prendre l'eau et à l'hygiène désastreuse sur le camp: il n'y a par exemple pas un seul toilette. Les gens font leurs besoins dans des sacs en plastiques qu'ils jettent un peu partout. J'ai du répéter plusieurs fois « vous êtes surs qu'il n'y a pas UN SEUL toilette? » pour y croire.
Deuxième baffe dans la gueule: a midi j'ai mangé pour la première fois sur le camp. Riz pois-poulet, comme d'hab (j'aime pas le riz pois). J'ai picoré sans trop d'appétit. A peine j'avais reposé mon plat que 4 gosses m'ont sauté dessus pour se battre pour les grains de riz restants et les petits bouts de chair de poulet que je n'avais pas mangé...horrible. Puis une dame est passée avec un bébé dans les bras en me demandant si je voulais pas l'emmener. C'est pas la première fois qu'on me demande ca et les gens ne le disent pas en blaguant, ce qui rend la situation encore plus atroce. Bref.
Sinon aujourd'hui le sous secrétaire général de l'ONU (en dessous de Ban Ki Moon), John Holmes, est venu dans un camp où nous travaillons. Il y avait beaucoup de monde et surtout énormément de casques bleus. C'est un vieux monsieur anglais qui parle bien le français et qui vous pose des questions en faisant semblant que ça l'interesse (« vous avez beaucoup d'enfants? » « Ah ok »). Je vous mettrai des photos.

vendredi 9 juillet 2010

Six months later....


Peut-être que le 12 juillet, le cas d'Haïti aura une petite place dans les médias internationaux. Ce sera le bilan des « 6 mois ».
Je ne suis là que depuis 2 mois et demi et pour moi l'avancement des choses peut se résumer à cette photo. Rappelez-vous, je vous avait fait un article sur ce « camp corail » sorti de nul part. J'y suis retournée avant-hier pour faire des interviews sur la situation des gens. RIEN n'a changé. Au lieu d'utiliser les programmes « cash for work » intelligemment comme en plantant des arbres sur ce terrain blanc et chaud ou en construisant des maisons, une canalisation qui sert à je-ne-sais-quoi à été construite. Les habitants rêvent d'une petite maison en bois. Ils ont entendu parler de maisons en tôles pour eux, en bois, en ciment, en... puis finalement ce ne serait qu'une rumeur, il n'y aurait peut-être plus de maison du tout. Seulement 5000 personnes dans des tentes blanches alignées sur un terrain aride au pied des montagnes en zone innondable loin de la ville, pommé, où les ONG ne savent que faire et finissent par tout laisser tomber (arrêt des distributions de nourriture...). On les avait déplacés dans ce camp en leur disant « vous verrez, ce sera bien ». Hier je parcourais ce camp où l'on se croit en plein désert, où la vie semble s'être arrêtée, où les gens n'ont plus d'espoir, et je me disais que j'aurais du mal à voir du positif dans l'action humanitaire à Port-au-prince.
Si beaucoup de choses n'ont pas changé, comme les gravas qui n'ont pas bougé de place (ou si on les a déplacés c'est pour mieux les entasser sur le terrain voisin), certaines choses ont évolué: la concentration de blancs au mètre carré, de voitures estampillées « UN », les rondes de casques bleus, un chiffre d'affaire en hausse pour les patrons des bars et restos chics, et surtout pour les compagnies d'avion Port-au-prince---> Saint-Domingue...
Port-au-Prince, 6 mois après, je n'y vois qu'une seule chose: l'image de l'échec de la communauté internationale et des ONGs dans l'action de post-urgence. Certes, des choses ont été faites. Mais c'est une goutte d'eau dans un océan. Manque de moyens financiers? Oula certainement pas! Manque de moyens humains? Non plus! Ce n'est que mon avis mais j'y vois une dichotomie: les haïtiens d'un côté, et les blancs riches (oui les nations unies sont TRES riches) de l'autre. L'humanitaire veut imposer son savoir faire occidental. C'est bien dans les jours qui suivent le séisme (médecins, distribution d'eau et de vivres...). Mais là on parle de RECONSTRUCTION. Et reconstruire sans le peuple haïtien c'est une entreprise vouée à l'échec. Les « cluster » onusiens sans un seul haïtien, à débattre de l'Haïti de demain, c'est tout simplement à gerber, et c'est LA la honte de l'humanitaire.
Il n'est pas trop tard pour changer, il reste de l'argent, beaucoup d'argent, et des moyens financiers. J'espère que la presse internationale en ce 12 juillet va tirer la sonnette d'alarme pour nous foutre un gros coup de pied dans le derrière et qu'on arrête nos conneries.
Vous ne serez pas surpris de savoir que Radio commerce n'a toujours pas d'eau potable. Sept fois que j'appelle World Vision et qu'ils me disent « on va y aller, mais ce n'est pas notre faute, de toute façon ». « C'est pas ma faute ». Voilà on en est là. C'est la faute à personne en particulier c'est celle de tout le monde.
Paradoxalement à ce constat d'échec (qui n'est pas une nouveauté dans ce blog puisque je vous gonfle avec ça depuis deux mois), je suis on ne peut plus contente de notre travail d'animation. C'est cool d'être stagiaire parce que je suis une des seules expats à ne pas me faire chier dans le bureau, je suis tous les jours sur le terrain, et c'est là qu'on apprend. On fait vraiment de belles choses. Je ne connais aucune ONG qui fasse de l'animation, surement parce que c'est pas une priorité comparé à l'eau, la nourriture, et l'école (ca peut se comprendre). Mais c'est vraiment quelque chose de très important. Les enfants ont fait une chanson « merci EDM pour apporter la vie dans notre camp ». Oui c'est un petit souffle de vie, de nos tentes sortent des bruits de tambours, de chants, des rires d'enfants. Elles résonnent haut et fort de la culture haïtienne, des racines créoles. Avant de venir ici je voyais l'animation comme quelque chose d'accessoire. On en fait, tant mieux, on en fait pas, tant pis. J'ai changé d'avis.
Je ne dis pas que ce qu'on fait est génial, très loin de là. On travaille avec des bandits, on fait des compromis, on fait des erreurs, il y a du manque de matériel etc. Mais on y croit, on veut faire toujours mieux. Tenez, hier et aujourd'hui c'était la formation des animateurs car on ouvre les animations dans les deux derniers camps à Cité Soleil mercredi prochain. Une dame est venue nous dire qu'elle voudrait enseigner le crochet aux enfants. Un professeur de musique est venu nous dire qu'il voulait partager son savoir du solflège. Et enfin nous avons rencontré un clown qui souhaitait ouvrir des activités cirques. On prend, on prend tout. On est comme des gosses à l'idée de faire de nouvelles choses, on est super enthousiastes, on imagine toujours plus. Bon le seul problème c'est qu'hier je me suis faite rappeler à l'ordre: je pars dans 15j donc il faut que j'arrête de lancer des projets à tout va qu'après on ne pourra plus tenir. Je dois abandonner l'idée de projection de cinéma en plein air à Cité soleil, l'idée de rassembler tous les animateurs de tous les centres pour qu'ils échangent leur savoir-faire... Je suis très contente de rentrer mais en même temps ca fait deux semaines que je m'éclate vraiment dans ce que je fais, que j'ai trouvé un sens à ma présence ici, et je m'entends super bien avec Johson et Julien des animateurs haïtiens avec qui je travaille.
 J'aime cette photo. Je l'ai prise le 12 juillet à la sortie de l'une de nos animations. Les enfants et notre superviseur sont sortis de la tente en chantant et en gambadant, le sourire aux lèvres.

jeudi 1 juillet 2010

Animations à Cité Soleil

Quelques news de mon travail quotidien. En ce moment je bosse avec un animateur haïtien, Johnson, et on met en place des programmes d'animation sur 4 camps d'hébergements à Cité Soleil. Cité Soleil, je vous en ai déjà parlé, c'est un endroit dangeureux. C'est morcelé en camps et depuis le séisme ces camps se multiplient et grossissent. Chaque camp a un ou plusieurs Comité, qui obtient généralement son pouvoir par la force. On a commencé cette semaine avec le camp Radio Commerce. C'est assez glauque comme endroit, pas une seule tente, que des baches et plastiques assemblés pour faire des petites cabanes, un terre gadoueuse, et pas un arbre. J'appréhendais un peu de m'y rendre mais j'ai été très agréablement surprise. Le comité est sympathique et motivé et nos animateurs aussi. Ca n'empeche pas qu'on doit faire très attention, quand je fais des erreurs stratégiques je me fais pourrir par Johnson et j'i plutôt intérêt à retenir la leçon. Je m'y rends presque tous les jours, une fois on m'y a emmenée en moto mais j'étais pas rassurée donc maintenant j'y vais avec un chauffeur en voiture. Je connais tous les animateurs et les personnes du comité ainsi que la plupart des enfants et ils me connaissent aussi, le matin en arrivant on a l'impression de débarquer dans un endroit qui nous est très familier. Il n'y a pas d'ONG là-bas pour les enfants, qui ne vont pas à l'école pour la plupart donc nos animations remportent un très vif succès (qui nous dépasse un peu parfois...). C'est énormément de travail; il faut faire des fiches de postes pour les animateurs, des listes de présence, organiser la distribution des tentes et du matériel (donné il y a quelques mois par l'UNICEF) et gérer toute sortes de problèmes. Le dernier en date: l'eau. Le camp a 3 containers d'eau, aucun n'est potable. Les gens achètent de l'eau « e n  sachet » et pour ceux qui n'en n'ont pas les moyens ils doivent se résoudre à l'eau des containers. Nos activités (surtout le football et la psychomotricité) assoiffent les enfants qui nous réclament de l'eau et vu qu'on n'avait pas anticipé, ils sont allés boire l'eau impropre. Je me suis renseignée sur l'ONG qui gérait ces containers (c'est comme pour chaque chose: dans l'eau il y a des centaines d'ONG, à chacune son camp ou sa zone). On m'a dit que c'était world vision (ONG américaine me semble-t-il) donc je les ai appelés aujourd 'hui. Voilà la conversation:
« - Bonjour
-Bonjour
-Je vous appelle car nous travaillons à Radio Commerce et nous avons un soucis avec l'eau qui n'est pas potable, les enfants la boivent et ça cause des problèmes de santé
- ah bon notre eau n'est pas potable
- non elle ne l'est pas
- C'est surement les transporteurs qui la stockent dans des camions mal entretenus
- Oui mais si World Vision gère l'approvisionnement en eau il faut s'assurer qu'elle est potable
- Oui je suis d'accord. On va vous envoyer un expert pour contrôler cela et traiter l'eau
- Ok merci, Aurevoir
- Aurevoir »
Et voilà. J'ai raccroché complètement ahurrie. Des mois que 5000 personnes vivent sans eau potable et c'est un problème qui se règle en un coup de fil (et ils ne savaient même pas que leur PROPRE eau n'était pas potable!!!!). Ca fait peur non? Ca m'a beaucoup choquée. Moi je m'attendais à des discussions interminables, à des réunions, à des solutions compliquées... Mais là si World Vision tient parole (si ils le font pas je les harcèle), il y a de l'eau potable dans les prochains jours. Il y a des choses comme ça qui me paraissent surnaturelles.
Sinon les animations se déroulent bien, avec Johnson on fait des rondes pour superviser. J'essaie d'être discrète mais quand je m'approche d'une tente d'animation les ptits hurlent « BLANCCCCCCC » et les animateurs leur font dire en choeur « Bonjour mademoiselle Violaine ». Pour la discrétion, raté. Après ils sont déconcentrés et les animateurs sont un peu stressés quand on assiste à leur travail donc je vais réduire mes visites. Le matériel de l'UNICEF est d'une grande qualité mais c'est du matériel d'animation européen, j'ai du expliquer et ré-expliquer comment utiliser avec les 3-6 ans les puzzles cubiques, les marionettes, la pâte à modeler...ce n'est pas des choses qu'ils ont normalement. Les animateurs viennent du camp et ils n'ont pas forcément énormément d'expérience dans l'animation, j'aimerais bien qu'on ait de l'argent pour faire venir des intervenants extérieurs pour les former. Mais bon personne n'a vraiment envie d'aller à Cité Soleil. La semaine prochaine on commence avec le camp Aviation, beaucoup plus grand et complexe. Tout se monnaye et les membres du comité sont tous plus ou moins des bandits (armés). Il n'y a pas de problème majeur de sécurité tant qu'on ne fait aucun faux pas avec le comité. Mais je vais quand même rester un peu en retrait de ce projet et m'occuper plus de la paperasse au bureau (ne serait-ce que pour que ma mère et ma grand-mère puissent dormir la nuit)!
Je vous joint un diaporama de quelques photos des activités.